Avant de porter la parole, faudrait peut-être penser à porter une culotte / Nina

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Aidan avait tout à fait l'habitude de ne pas passer inaperçue, mais alors ici c'était encore pire ; la taille de la ville non-officielle était fatalement réduite vu la température qui régnait, étouffante. Et la louve se demandait très sérieusement combien de fois par an il pleuvait ici. Deirdre ayant manifestement des affaires à régler ici – ce qui signifiait encore des nuits blanches et des inquiétudes pour elle, mais bon, elle s'était résignée... et puis avait repris contact avec un photographe pour faire des shoots dans le désert – donc elles étaient sans doute là pour un moment.

Après avoir passé un peu de temps à organiser le campement, et avoir appelé son jumeau pour avoir des nouvelles – « mais comment tu fais pour supporter un gosse, c'est épuisant » –, Aidan décida d'aller faire un tour en ville.
Elle découvrit avec surprise que d'aucuns avaient installé un genre de marché-troc poussiéreux, où ils s'échangeaient des racines consommables contre un peu d'essence, ce genre de choses.

Comme elle avait plutôt soif et s'était laissé dire que l'essence ne se buvait pas, elle tira jusqu'à un bar dont elle avait entendu parler mais dont elle n'avait pas encore franchi la porte. En outre, il fallait bien qu'elle explore ce genre de lieux, parce que son photographe allait arriver et que c'était plus sympa de lui offrir un verre, n'est-ce pas ?

Quand elle entra, par un fait qui semblait être plus fréquent que ce qu'elle aurait pensé, la serveuse lui rappela vaguement quelque chose.

« Bonjour... On se serait pas déjà vues quelque part ? »

Elle renvoya derrière son épaule ses longs cheveux qui ne paraissaient pas lui tenir chaud – si – et passa la main dans sa nuque avec un léger soupir :

« Vous servez quoi, ici ? »

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Il s'avère que pour l'heure, bosser au Sleepy Wolverine est un véritable plaisir par rapport à tout ce que j'ai pu connaître auparavant. Tout ce que j'ai pu connaître en termes de boulots purement alimentaires, s'entend, parce que sinon j'étais bien mieux en tant que chargée d'événementiel du Sapphire, c'est une évidence. Mais bon sang, par 35° à l'ombre, ici la climatisation fonctionne, j'ai la possibilité de ramener des frites et un burger au campement chaque fois que je suis en service, et si les clients sont trop chiants je suis même autorisée à les envoyer chier et même à leur péter des verres sur la gueule. Bon, je suis pas sûre pour les verres, le patron y tient sans doute... Mais j'ai le droit de cogner, en tout cas, et c'est pas négligeable. Pour l'instant je m'en suis toujours bien tirée, chaque fois qu'un client s'est montré trop lourd, Silver était là pour le remettre à sa place et ça aussi, c'est rassurant.

Bref, je suis de relativement bonne humeur compte tenu des circonstances, à tel point que je ne suis pas sur la défensive lorsque la brune plantureuse m'aborde. Je plisse les yeux, et je sais que je ne fais le rapprochement que parce que j'ai vu Deirdre quelques jours auparavant, autrement je ne crois pas que je l'aurais reconnue. Je crois que si... Au Parking, non ? Je préfère demander pour être sûre avant de balancer direct que je connais sa femme, on sait jamais, si je me gourre j'aurais l'air con.

Ici ? T'as de la chance on sert quasiment tout ce que tu veux. Même des cocktails si on a c'qu'il faut, qu'est-ce qui te fait envie ? J'ai pris l'habitude de tutoyer tout le monde ou presque depuis qu'on est arrivés, le campement ne se prête pas vraiment aux politesses d'usage.

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Aidan fit un sourire détendu à la jeune femme qui ne paraissait pas avoir peur d'elle, comme la grande majorité des gens – ce en quoi la grande majorité avait légèrement tort, mais Aidan se gardait de détromper son monde, préférant obtenir ce qu'elle voulait par la douceur.

« Ah, oui, sans doute, j'y habitais. Marrant qu'on se recroise ici, tu fais quoi dans le coin ? T'es venue prendre le soleil ? »

Elle eut un léger sourire :

« Fait atrocement chaud, ici. »

Ce qui n'était pas étonnant partant du principe que c'était un désert ; heureusement le bar était un peu plus frais que l'extérieur. Aidan se percha sur un tabouret, croisant ses jambes nues.

« Des cocktails ? Génial. Tu sais en faire beaucoup ? Je peux t'apprendre si tu veux, j'étais barmaid à New York...
En attendant je veux bien de l'eau gazeuse avec du jus de citron, il est un peu tôt pour picoler », rit-elle.

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Si je ne crains pas la brune qui me fait face, ce n'est absolument pas en rapport avec son physique, je suis particulièrement bien placée pour savoir qu'il ne faut pas se fier aux apparences... Deux types éclatés à coups de casque de moto dans un entrepôt du Bronx pourraient confirmer mes propos, si Slavenko ne les avait pas balancés dans un conteneur, mais c'est une autre histoire. Je ne dirais pas que j'ai confiance en elle, je ne la connais pas, mais je pars du principe que je n'ai normalement rien à craindre de la femme de Deirdre... J'ai suffisamment d'ennemis, déjà trop de personnes dont je dois me méfier, si je peux éviter d'allonger la liste, ça m'arrange.

Je dodeline de la tête dans un sourire. Ouais, si on veut. Prendre des coups de soleil, plutôt. En témoignent mes joues rougies, mes épaules aussi. Je ne tiens pas à dire que nous avons fui, si elle y tient Deirdre la mettra sans doute au courant mais moi je surveille quand même mes arrières un minimum. Et encore j'ai de la chance, dans le bar la clim fonctionne. Ce qui n'était pas du tout le cas là où je bossais avant... Et encore moins dans le van où on n'a même pas un ventilo !

J'étais barmaid aussi pendant un temps, du coup j'me débrouille pas trop mal, ouais. Mais je n'ai jamais fait d'études pour ça, ce n'était pas une vocation. Mais j'suis jamais contre quelques cours, ça m'occupera. Mon ego n'est pas surdimensionné au point que je veuille faire le concours de la meilleure barmaid avec cette fille ! Si elle est plus douée que moi et qu'elle peut m'apprendre quelques trucs, je prends. En attendant, je lui sers sa boisson. J'te rajoute des glaçons ?

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La louve eut un léger rire, vraiment amusée par la réaction de Nina qui effectivement arborait des coups de soleil :

« Je suis sûre qu'un trafic de crème solaire ici marcherait du tonnerre. »

C'était une idée à développer, elle essaierait d'organiser ça, tiens, avec la complicité de Raccoon ça devrait bien marcher, non ?
Aidan hocha de la tête à la mention de la clim, qui devait coûter un fric monstre, mais qui était clairement pas du luxe ici vu la température extérieur :

« ça nous occupera tant que j'ai pas monté mon business de crème solaire ! Tu me diras quand j'peux passer pour te montrer ça. Ça me rappellera aussi de bons souvenirs. »

La période Lanterne Rouge, puis Lumignon Blanc, avait eu son lot de petites et grosses misères, mais dans l'ensemble Aidan s'en rappelait comme étant de bons souvenirs.
Des moments où elle se posait aucune putain de question sur genre sa sexualité ; pas qu'elle regrette maintenant d'être mariée, cela dit. Seulement à l'époque, tout était simple, son seul grand problème était le comportement d'Avery, ha !

« J'veux bien oui ! T'as été voir la montagne colorée ? Elle m'intrigue totalement, comment ça se fait qu'elle est là ? »

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J'en suis sûre aussi, ouais ! J'ai chopé de la crème mais visiblement c'est pas suffisant. Déjà, on était là depuis quinze jours quand on a commencé à se soucier de ce genre de problèmes. Ensuite, ça coûte une blinde la crème solaire par rapport à nos moyens et avec la peau que j'ai et le soleil qu'il y a ici, il faudrait que j'en vide un tube toutes les semaines, voire plus. J'ai fini par acheté un grand chapeau à une nana sur le campement, c'est plus économique. Ca protège mon visage et mes épaules, quand je n'oublie pas de le prendre avec moi pour sortir en tout cas.

Je plisse les yeux, amusée. Monter un business ? Tu penses rester dans le coin longtemps, du coup ? La plupart des gens qui débarquent à cette saison ne font que passer s'ils n'habitent pas déjà ici. Tu peux toujours passer avant mon service, à 17h, y a jamais personne. Ou personne qui nous empêchera de bosser un cocktail ou deux, en tout cas.

J'ajoute la glace dans son verre et acquiesce dans un sourire en le lui tendant. Oui, j'ai pu aller y faire un tour et du coup mon mari s'était renseigné. De c'que j'ai compris, c'est un type qui l'a construire, ça lui a pris trente piges de le faire. Tout en peinture et en paille.

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La louve eut un rire réellement amusé à la réflexion de Nina sur le chapeau :

« Ouais, et puis meilleur pour la peau, je sais pas toi mais moi la crème solaire, ça me convient pas vraiment et surtout pas sur le visage. Je comprends pas pourquoi les fabricants continuent à réaliser de telles saloperies ! »

Bref, on l'aura compris, madame Williamson avait un avis très précis sur beaucoup de produits cosmétiques – ce qui n'était pas très étonnant vu son allure, pourrait-on dire. Aidan se fit la réflexion que tant qu'elle y était à faire des cocktails elle pourrait sans doute trouver une recette de crème solaire un rien moins nocive que ce qui était vendu sur le marché, mais que ça donnerait un business vachement moins drôle que trafiquer directement depuis le Mexique.
Elle posa son regard bleu glace sur la jeune femme :

« Oh, je ne sais pas vraiment en fait, je suis en voyage de noces... »

Elle eut un sourire entre l'attendrissement et l'exaspération, une expression loooooonguement travaillée :

« Bon, sauf que je me suis mariée avec quelqu'un qui ne peut pas s'empêcher de bosser, donc on est ici pour affaires. Et j'me dis qu'il y a pas de raison que je bosse pas ! »

Elle hocha de la tête :

« J'passerai demain alors, avec plaisir... j'ai pas entendu ton nom je crois ? Je m'appelle Aidan », précisa-t-elle avec son habituelle expression gentille. « Ah ouais, 30 ans ? C'est dingue d'avoir fait ça tout seul ! »

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Je hausse les épaules, on sait bien comment ça fonctionne, tout n'est que marketing, personne ne cherche réellement à savoir ce qu'on fout dans les produits de beauté, sinon les gens prendraient peur et personne n'en achèterait. Certaines sont bien, de meilleure qualité aussi... Mais forcément elles coûtent une blinde. Tout ce qui est prétendument bio et/ou naturel est hors de prix. Seuls les riches peuvent se permettre de faire gaffe à ce qu'ils consomment. Et puis ici, dans ce désert, on ne trouve pas vraiment ce genre de produits. En revanche, on trouve des tas de choses faites main sur le campement.

J'arque un sourcil, amusée. Un voyage de noces à Slab City ? C'est original... Il n'y a pas de jugement dans ma voix, je sais que j'aurais suivi Slavenko n'importe où... D'ailleurs n'est-ce pas ce que j'ai fait ? Pour affaires pendant votre voyage de noces ? Merde, ça c'est moche. C'est la seule chose qui m'a toujours tenu à coeur, quand on partait en escapade avec le slave. Qu'il coupe tout contact avec le taff durant les quelques jours qu'on pouvait passer tous les deux. Il ne l'a jamais réellement fait... Mais il était discret, quelques SMS rapides quand il me pensait endormie, un coup de fil pendant que j'étais sous la douche.

J'ai un sourire en me présentant à mon tour : Nina. Et ouais, 30 piges... Si ça t'intéresse tu d'vrais y aller, y a des types qui organisent des visites guidées pour raconter l'histoire du truc.

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