Je n'ai joué que des seconds rôles que j'ai transformés en premiers rôles || Raccoon

Il me faut un temps fou pour me rappeler où je me trouve.
Pourtant je me mets souvent dans cet état hein, mais là pas moyen de savoir où je suis pendant ouais, une éternité. (5 minutes).
Je passe cette éternité à regarder les grains de poussière glisser le long des rayons de lumière créés par les volets niqués qui font tant bien que mal barrage au soleil. Ah, il fait encore jour, plus ou moins. Malgré la chaleur un frisson m’assaille, signe que j’ai trop dormi. A côté de moi le corps de mon amant du jour bouge dans le flot tranquille du sommeil, ourlé de draps disposés sur un lit de fortune – plusieurs matelas disposés côte à côte, au cas où, les orgies tout ça.  C’est bizarre pourtant quand je baise, je dois me casser tout de suite après pour aller fumer une clope et passer à autre chose. J’aime pas la mélancolie sentimentale qui s’installe entre mon (mes) partenaire(s) et moi pour avoir un câlin. L’âge, sans doute.

Ah oui, je sais. On est au deuxième étage du Huitzilin, porte quatre. La première chambre libre qu’on a pu trouver entre deux baisers gorgés d’hormones, sans doute qu’on s’est manqués.
Je fais claquer quelques fois le plat de ma main sur ces fesses rebondies savamment disposées au niveau de ma hanche.

« Eh Saminou bouge toi j’ai faim, on va aller chercher à bouffer. »

« Elle est de ton côté bichon, juste là. »

Enfin la bouteille est surtout un gros bidon qui si vous voulez mon avis n’a pas toujours contenu que de l’eau, mais qu’est-ce que vous voulez, on fait ce qu’on peut avec ce qu’on a – remarque ça expliquerait pourquoi on est tous un peux toqués du ciboulot par ici, n’est-ce pas. Samuel se relève et je prends conscience qu’on était collés l’un à l’autre par la sueur parce qu’il m’offre une épilation gratuite du flanc ; bordel de cul, ça réveille sa race.

« Ah le Queenie très bonne idée. Allons-y. »

Je prie tous ces dieux auxquels je ne crois plus pour trouver la force de me redresser. Ma tête me tourne méchamment, il va falloir que je me roule un oinj’ pour faire passer cette migraine qui monte tôt ou tard. La nausée s’est logée dans ma gorge mais j’ignore si c’est parce que j’ai très faim, ou alors parce que j’ai trop bu cette nuit.
Sans doute un peu des deux.

« Tu te souviens de ce qu’il s’est passé hier soir toi ? » je demande en passant un string et cherchant à y faire tenir mes boules – apparemment c’est un string de gonzesse parce que je galère.

Je lui jette un regard outré.

« J’ai fait ma guest star ? Mais je suis une guest star. A quoi ça sert de coucher avec l’animateur principal du talk show host si on ne peut pas crâner au talk show host après ? »

J’ai un rire léger, les yeux partant dans le vide, dessinant sur les murs et le plafond les scènes d’hier soir avec les vagues souvenirs que j’en ai comme des reflets sur l’eau d’un étang qu’on briserait avec un caillou. M’enfin ! Ce qui s’est passé hier reste hier, et aujourd’hui est un nouveau jour déjà plein d’aventures prometteuses.

« S’il est tard, il ne faut pas tarder ! Oooow. » Je sursaute dans un frisson quand il me cale les boules dans le string. « Ne me touche pas comme ça grand fou, ou nous allons remettre le couvert. »

Enfin théoriquement, comme cette chère Cendrillon dont le charme se rompt à minuit, je ne suis ce matin plus le mignon de mon Saminou, quel dommage. Nous descendons les escaliers du Huitzilin désert et croulons bientôt sous le soleil brûlant de Slab City.

« C’est qui ton amant d’aujourd’hui déjà ? »

Et après c’est moi la guest star.