We'll be counting stars - Slavina

Il m'attire contre lui, m'enlace et je vibre de bonheur, de contentement à avoir le droit à ses bras de nouveau. Comme avant. J'en ai un douloureux soupir de mélancolie que j'étouffe contre ses lèvres quand il vient réclamer ma bouche pour un nouveau baiser. Je l'enlace, me serre contre lui, fourre mes mains dans ses cheveux dans ce geste qui le déclare mien quand bien même j'ai l'impression ces derniers temps qu'il n'est plus vraiment à moi. I ja volim te. C'en est douloureux, terriblement douloureux tant je l'aime, tant j'ai peur de le perdre, parce qu'on me l'aura enlevé ou parce qu'il finira par ne plus être capable de remonter la pente. Chaque fois l'amour est accompagné d'une bouffée d'angoisse, mais ce soir je parviens à la refouler, parce qu'il me serre contre lui, qu'il m'a préparé une soirée romantique, qu'il m'a offert un cadeau d'anniversaire... Ce soir je n'ai pas envie d'avoir peur et je lutte, vraiment très fort, pour que ce ne soit pas le cas.

Non, non, je préfère encore ribica... ou princeza. Pas ma petite guimauve ! Mais il est doué pour me faire céder, la preuve avec ribica ! J'étais entièrement contre au début ce surnom que je trouvais ridicule, et j'ai fini par l'adopter au point de l'utiliser moi-même... Je suis faible face à lui. Je frémis parce qu'il me caresse les fesses et je souris, encore émerveillée. Oui, moi aussi je l'aime vraiment bien... Cette robe, c'était une idée géniale, il n'aurait pas pu mieux faire. Je le serre plus fort contre moi, fourre mon nez dans ses cheveux pour humer son odeur. J'ai pas encore envie de dormir... Et puis on est bien ici... C'est confortable ce qu'il a installé, et je n'ai pas envie de bouger. Chaque fois qu'on bouge on finit par s'éloigner... Je caresse ses épaules, son dos, peste après ces fringues qui me gênent parce qu'elles m'empêchent l'accès à sa peau. Je veux te déshabiller... Je peux ? Oui, j'ai encore besoin de lui demander la permission, contrairement à lui.

—Pourquoi ? Moja maršmalousa, c'est joli. Je gronde d'un petit rire rentré au fond de la gorge, en me souvenant comme elle déteste mes surnoms étranges, même ribica, ou ma caille. C'était un jeu amoureux autrefois que la faire sortir de ses gonds et réclamer des baisers-punitions pour me faire taire. —Moja Princeza, ti si moja princeza Peu importe le lieu, elle reste ma princesse précieuse, mon amour, celle pour qui je ferais tout. La seule personne au monde que j'aime. Tous les autres sont des traîtres, ou morts, des fois les deux en même temps.

Je suis tout habillé, hormis le froc baissé à demi dans un esthétisme douteux. Comme avant quand on était trop pressé, je suis à présent ligoté au niveau des cuisses comme un veau au rodéo ! Ça n'a pas changé, j'ai toujours mes rangers qui sont parmi mes possessions les plus précieuses avec mon bracelet et le flingue. Les endorphines couplées à la fatigue et l'émotion prenant largement le pas sur l'angoisse, j'acquiesce à sa demande sans hésitation. —oui, j'ai beaucoup trop chaud ! Je me redresse en position assise, par facilité pour tendre les bras et qu'elle m'ôte mon tee-shirt. J'ai un pansement collé sur ma nouvelle cicatrice qui peine à se refermer malgré les points de sutures. Entre l'eau douteuse, la poussière, la crasse, la sueur, bonjour pour se soigner. Pour les autres, on était en cavale, et finalement comme on s'est planqué dans des motels très souvent, ça a été plus facile qu'ici à se soigner, c'est dingue. Mais la douleur est relative, j'ai connu pire. Je me penche en avant pour défaire mes lacets compliqués. J'ai un regard en coin, demi-sourire amusé —tu peux enlever ta robe si tu veux...j'voudrais pas l’abîmer dès le premier soir. J'ai un coté destructeur de fringues indéniables. De multiples façon d'ailleurs.

Marsma quoi ? Je répète dans un rire en écarquillant les yeux, le mot sonne étrangement à mes oreilles ! Je lève le nez pour regarder autour de nous et plisse les yeux dans un sourire. Mmh, t'es en train de me construire un château-caravane de princesse... Je dois dire que les palissades me rassurent, j'aime la façon dont elles nous isolent du reste du campement, et surtout des gens qui viennent se baigner au canal. Maintenant ils évitent de passer par ici. Et puis nous serons bientôt complètement à l'abri des regards, ce qui n'est pas négligeable. Je ne me sens pas en sécurité, mais au moins j'ai la sensation d'avoir un peu plus d'intimité, et ça me manquait vraiment beaucoup.

J'ai un sourire soulagé quand il accepte que je lui ôte ses fringues, pourtant nous sommes dehors alors c'est un sacré progrès ! Je me redresse rapidement, de crainte qu'il ne change d'avis, et j'entreprends de lui ôter le tee-shirt moite de sueur qui lui colle à la peau. Je le laisse s'occuper lui-même de ses chaussures et de son froc, et je souris en coin à sa proposition à peine dissimulée. Mh, t'as raison, ce serait dommage... Je m'étire donc pour retirer la robe seconde peau que j'adore déjà, et je sais qu'elle vient d'adopter une valeur sentimentale à mes yeux, parce qu'il me l'a offerte dans des circonstances si particulières... Une fois que je l'ai ôtée, je me laisse tomber en arrière dans les coussins et je lève sur lui un regard mutin en glissant mes doigts sous l'élastique de ma culotte. Et ça, j'en fais quoi ?

—Un château-fort ouai, avec des murailles, des douves et j'installerais un pont-levis. Je peux en plaisanter ce soir. Je commence à prendre la mesure qu'on va habiter ici quelques temps vu que Logan nous cherche toujours. Je commence aussi à faire le deuil de notre vie perdue, de nos projets perdus et à me focaliser sur maintenant et ce qu'on a. Et j'ai Nina, c'est bien tout ce qui compte.

J'accepte de me foutre à poil. Assez bizarrement, c'est de ne pas avoir mes godasses aux pieds qui m'ennuie. Parce que si on se fait attaquer, être pied nus, c'est problématique. Bien plus qu'avoir la bite à l'air, si, si. C'est plutôt agréable d'être nu sous une température pareille et je reviens m'allonger dans les coussins que j'ai installé dehors. Je roule à coté de Nina et une bouffée de chaleur me prend quand elle me provoque. Je mords rapidement ma lèvre inférieure avant de me décider et souffler. —garde là, tant pis pour elle. Je t'ai toujours pas gouté moja maršmalousa mala. Je descends comme un serpent, pour coller mon visage contre son ventre. Je hume l'odeur de Nina qui se mêle à la mienne, une odeur de sexe assouvi qui me plait, m'excite aussi. Puisque l'obstacle de tissu est là, je joue avec. Je le longe du bout de la langue, je tiraille dessus en faisant claquer l’élastique, je souffle de l'air chaud sur le clitoris par dessus le coton avant que je ne le mouille de salive. Je mordille le sous-vêtements et les chairs qui se cachent dessous, protégées mais pas inaccessibles. J'ai envie de prendre mon temps pour la goûter. Je touche plus bas la culotte mouillée de sperme et de cyprine et je masse doucement par dessus le tissu, une nouvelle fois. —écarte bien les jambes srce, on va continuer un peu comme ça...ça te plait ? Oui ça te plait, je le sens... C'est la première fois que j'ose parler pour donner des directives autoritaires ou commenter de façon salace, et non plus des demandes d'autorisations, j'ai dit que je progressais non ? Ce soir est un grand pas.

Je dodeline de la tête. Moui, des douves pour les bestioles... Et puis il faut que tu construises une tour, surtout. Les princesses sont toujours dans une tour, gardées par un dragon. Je plisse le nez en ajoutant : C'est toi le dragon. Moi je veux encore qu'il me protège, qu'il me défende et me réclame surtout. Peu importe ce qu'il nous est arrivé, je ne veux pas qu'il cesse d'essayer, j'ai besoin qu'il veuille encore veiller sur moi. Je ne le pense pas incapable de me protéger, j'ai seulement peur de demander parce que j'ai l'impression que lui s'en pense incapable, ou n'en a plus envie...

Ce soir, pour la première fois, je me risque à jouer, d'abord gentiment mais c'est quand même un sacré progrès... Et même un sacré risque je dirais parce qu'il n'est pas toujours très réceptif figurez-vous. J'ai un peu peur qu'il me refroidisse mais non, son regard s'assombrit, je le vois mordre sa lèvre et une coulée de métal fondu me tombe dans le bas-ventre. Je me mords la langue pour ne pas lui répondre que moi non plus, je ne l'ai toujours pas goûté, je ne veux pas reproduire la catastrophe de la dernière fois... Puisqu'il ne veut pas que je l'ôte, je retire mes doigts de l'élastique de la culotte, prête à la laisser tranquille.

Je m'attends à ce qu'il me fasse languir un peu, qu'il s'allonge juste à côté de moi, qu'on passe gentiment à des câlins post-sexe très chastes comme c'est le cas depuis qu'on s'est retrouvés. Mais il se laisse déjà glisser le long de mon corps, son visage brusquement entre mes cuisses et j'inspire dans un hoquet de surprise. Une décharge électrique me court le long de l'échine et j'obéis, écartant les jambes dans un soupir avide. Sa voix rauque provoque une onde de désir qui serpente sous ma peau, me réchauffe le ventre, ravive les souvenirs de nuits enfiévrées passées dans le creux de ses bras et je soulève le bassin, me tends vers sa bouche en soufflant : Oui, oui encore, s'il te plaît... Le voir autoritaire pour la première fois me donne particulièrement envie d'être docile, j'ai l'intention d'être très sage.

—D'accord, voilà, c'est très bien mon amour. Je la félicite d'un baiser sur son ventre quand elle s'installe mieux en me laissant le champ libre. Je reprends mes agaceries et sa culotte finit par être complètement trempée de fluides. Je lui ôte alors pour la dévoiler complètement à moi. Je pétris ses cuisses, son ventre, son entrecuisse, rôde et tourne autour de mon objectif avant de fondre dessus après une reconnaissance poussée du terrain. C'est primordial !

J'embrasse son sexe d'un baiser appuyé, puis un autre, qui écarte les grandes lèvres pour que je puisse y glisser ma langue. Je la goûte alors enfin, glissant dans les replis encore plus intimes qui palpitent contre ma langue. —oui, t'es très très bonne duso. De la main, je viens maintenir les lèvres de son sexe ouvertes alors que je tête et suçote la chair frissonnante et mouillée. Elle a mon goût, je trouve ça délicieux de sentir nos ébats sur mes papilles. —Jebote, t'es bonne... Mon désir est revenir et je pourrais surement la baiser, mais je préfère nettement la faire jouir de ma bouche, en cadeau d'anniversaire. Je m'applique, me mets à l'écoute de son corps et de ses réactions, jouant avec elle pour faire monter désir et plaisir dans un duo délicieux, crescendo.

Je soupire d'aise quand il me retire enfin le sous-vêtement qui commençait à m'agacer, autant parce qu'elle est trempée que parce qu'elle me prive bien trop de sa bouche. Je tends une main vers lui pour la glisser dans ses cheveux, l'autre tendue sur le côté, accrochée à un coussin qui me permet de supporter ses assauts terriblement fourbes ! Je ne me suis pas encore habituée à ce qu'il me parle, pourtant il le faisait constamment avant, et ça me manquait terriblement, à tel point que j'ai du mal à y croire ce soir. Peut-être que c'est une façon pour lui de fêter mon anniversaire...? Peut-être que dès demain ce sera fini ? Je ne veux pas y penser, je veux en profiter tant que ça dure, tout cesse toujours trop tôt.

Mon cerveau se met sur pause, enfin, et mon corps prend le relais, si réceptif que ça pourrait être perturbant si je n'étais pas habituée à ce que mes réactions soient aussi exacerbées à son contact. Mes hanches se soulèvent contre mon gré, me portent vers sa bouche que je réclame en gémissements avides. J'ai encore terriblement envie de lui, de son corps soudé au mien mais on n'a encore jamais fait l'amour deux fois d'affilée depuis que nous sommes ici et j'ai peur qu'une seule étreinte lui suffise pour tenir une semaine ! Je préfère encore réprimer mes désirs que d'essuyer un refus qui gâcherait la soirée. Alors je me concentre sur la sensation exquise de sa langue sur moi, le plaisir qu'il me dispense par vagues brûlantes qui me font trembler un peu plus fort à chaque fois. Il prend son temps pour me faire grimper plus haut et j'ai le temps de sentir l'orgasme venir, la boule de chaleur enfler dans mes reins, mon ventre se contracter douloureusement. J'abandonne ses cheveux, plaque ma main sur son épaule. Putain oui. Mon corps s'arc-boute sur les coussins, et j'exulte dans un cri.

Je vibre à la sentir s'abandonner à moi, c'est une sensation à chaque fois unique et qui comble mon âme. Je respire sa peau, goûte ses élans, ses frémissements, son plaisir. Elle s'agrippe à moi et crie son plaisir et un long frisson me parcoure. Je remonte contre elle pour la serrer dans mes bras. Je me colle à son corps brulant et pourtant frissonnant, secoué de spasmes qui me ravissent. Elle est douce, belle et je l'aime à me damner, à en mourir. J'enfouis mon nez dans ses cheveux longs, je la hume, la respire, suce la peau de son cou en des micro-baisers. Je la laisse monter haut, profiter des vagues extatiques, soupirer encore avant de réclamer sa bouche. Mon cœur s'est affolé et le sang bat mes tempes et ma queue durcie contre sa peau dans le même rythme du désir.

J'ai la tête qui tourne un peu, vertige de l'amour. Mes réticences s'étiolent dans les pulsations qui charrient l'envie après trois jours d'abstinence qui éclatent dans la déferlante de plaisir. Je prends la main de Nina, la guide vers ma queue dans un geste on ne peut plus explicite alors que je cherche sa bouche avec volupté, en grognant un peu, animal en quête de plaisir. C'est comme si nous étions revenus quelques mois en arrière, au bord de ce lac où nous avions campé et partagé ces marshmallow grillés.

Je flotte dans la béatitude absolue, les vagues résiduelles de l'orgasme me transportent encore et sa bouche a quitté mes cuisses que je gémis encore, à fleur de peau. Mon rythme cardiaque s'est affolé terriblement et mon ventre se contracte encore au rythme des frissons qui me parcourent. J'ai un geignement plaintif quand sa bouche trouve la mienne et je me jette contre ses lèvres dans un baiser affamé, emplie d'amour, de gratitude aussi. Comme à chaque fois, je réalise surtout à quel point ça m'a manqué, comme j'ai besoin de lui, de son contact et de ses attentions. Je ne sais plus vivre sans lui appartenir, sans que nous soyons liés.

Je ne prends conscience de son érection que lorsqu'il guide ma main à son sexe et je couine de contentement de sentir qu'il me veut encore, que je suis encore capable de lui faire cet effet-là. Je ne l'admettrais jamais à voix haute mais j'ai peur qu'il se contente de m'utiliser pour satisfaire un besoin purement physique, une fois de temps en temps, sans avoir réellement envie de moi. Je bascule sur le flanc, enveloppe sa queue de ma main en soupirant d'envie à le sentir tressaillir dans ma paume. Je ne demande rien, ne me risque certainement pas à parler, mais ma façon de l'embrasser est bien plus éloquente que des mots. Je suçote sa langue avidement, goûte ses lèvres comme je le ferais d'une friandise, mes baisers suivant le rythme de mes doigts autour de lui.

Je me jette passionnément dans cette étreinte post-sexe, pré-sexe, à nouveau les limites deviennent floues et c'est ça qui est divin. On n'a jamais eu ce truc de dire préliminaires, baises, et câlins, tout se mélange tout le temps, désir constant de se posséder. Ses baisers relancent merveilleusement la mécanique, plaisir et émotions m'étouffent délicieusement, m'oppressent avec cette sensation familière qui m'a tant manqué. Je suis affolé de sensations divines entre sa main qui m'enserre, sa bouche qui m'évoque des délices oubliés.

Je ramène une main derrière son crâne pour agripper ses cheveux, me pressant avec rage contre elle, me jetant avec passion dans ses baisers. J'ai brutalement envie qu'elle me suce mais j'ai peur de m'éloigner d'elle, de sa bouche alors je laisse monter la pression, pour être sur de ne plus reculer quand je le voudrais tellement que ce sera devenu une idée fixe. Je balbutie —doucement... zelim... je veux... Je gronde, ondule dans sa main, recherchant l'augmentation de la tension qui m'attrape brutalement dans ses griffes. Et brusquement avec un éclat de fureur et de frustration, je tire ses cheveux pour l'écarter de moi et dans un élan insensé je réclame le ton grondant et rauque —je veux ta bouche

Mes intentions sont très loin d'être sages, je sais qu'il le sait, mes baisers ne sont ni anodins, ni innocents, je ne cherche même pas à faire semblant. Je crains qu'il se sente pris au piège, c'est pour ça que je ne demande rien, que je me contente de l'embrasser, il aurait après tout tout le loisir de s'écarter de ma bouche pour fourrer son visage dans le creux de mon cou, s'y cacher sans que je puisse rien y dire. Mais non, sa bouche répond à la mienne, son souffle se raccourcit au contact du mien, ses mains s'accrochent furieusement à mes cheveux et surtout, je sens sa queue qui tressaille, gonfle encore entre mes doigts.

Sa demande ressemble terriblement à un ordre et je couine en m'arrachant à lui. Je voudrais prendre mon temps, mais je suis partagée entre le désir de le redécouvrir à mon rythme et la peur qu'il ne change d'avis. Alors je me laisse glisser le long de son corps sans attendre, pressant ma bouche contre son ventre. J'aspire la chair doucement, la suçote sans encore oser la marquer d'un suçon quand bien même j'en crève d'envie. Il a trop de cicatrices nouvelles pour que je me risque à lui infliger une marque de plus. Je crochète mes mains à ses flancs et je lève les yeux vers lui à l'instant où je pose mes lèvres sur son gland. Je suis attentive, à l'affût malgré l'impatience qui me ceint les reins. J'ai compris qu'il avait besoin de maîtriser la situation et j'essaie de ne pas lui donner l'impression qu'il perd le contrôle. Alors j'attends de lire le désir sur son visage, de deviner s'il veut quelque chose de rapide et brutal ou s'il préférerait que je le fasse languir.

Je ne suis pas totalement idiot, je savais bien en faisant cette soirée romantique que ça tournerait au sexe. Depuis qu'on a renoué, je la sens bien plus demandeuse que moi, qui suis empêtré dans ma timidité nouvelle et mes réticences nées du fait que je suis très mal à l'aise avec mon corps et ses désirs. Je voulais lui plaire ce soir, lui montrer que je l'aime et que malgré tout ce qu'elle croit, je la veux et que j'ai toujours désespérément besoin d'elle. Je ne sais plus qui je suis, ce que je suis, je sais seulement que je veux toujours être à elle. J'ai besoin d'être à elle sinon je me perds.

Je rate une longue respiration quand elle se porte au niveau de ma queue et mes pupilles se dilatent d'appréhension et d'anticipation, les deux à la fois mélange qui me crispent les reins de trouille et de plaisir. Oui j'ai besoin d'avoir le contrôle, et j'enroule d'ailleurs ses longs cheveux autour de ma main, dans une illusion que c'est moi qui guide ses gestes. Je ne peux pas supplier, implorer, je ne le supporterais pas mais je pose mon autre main sur sa nuque pour l'inciter d'un geste à m'engloutir. C'est moi qui pénètre sa bouche, avec lenteur, poussant mon bassin dans le velours chaud. J'accepte ce plaisir pur dans un long soupir gémissant mâtiné d'un juron rauque. Je m'écarte, donne un coup de rein plus ferme en grognant, avide de jouissance.

A aucun moment je ne m’attends à ce qu’il me supplie, certainement pas. Au contraire, j’attends ses directives, pas forcément de façon concrète, formulée, mais j’ai besoin de savoir jusqu’où je peux aller, quelles sont les limites à ne pas franchir et ce dont il a envie. C’est dingue de devoir tout calculer comme ça, d’être sans cesse emplie d’appréhension mais on est encore trop instables tous les deux pour que je me permette quoi que ce soit d’autre. Si je vais trop lentement, je crains que ça lui laisse le temps de réfléchir et qu’il ne se paralyse ou bien change d’avis. A l’inverse, si j’y vais trop vite, trop fort, j’ai peur de le brusquer, de l’effrayer et que le résultat soit le même. Je me console en me disant que ce n’est que provisoire, qu’on finira par surmonter tout ça, mais en attendant j’ai besoin qu’il me guide, qu’il mène la danse d’une façon ou d’une autre, et c’est ce que j’attends en rivant mon regard au sien.

Ses doigts se crispent sur mes cheveux et c’est lui qui impulse le mouvement, amenant sa queue à ma bouche. Je ferme les yeux sous l’afflux de plaisir qui me vrille brusquement les nerfs, sentiment de victoire à le sentir s’enfoncer dans le fourreau brûlant de mes lèvres jusqu’à ce qu’il bute au fond de ma gorge. C’est moins jouissif que si j’avais la main mais je savoure le simple fait d’avoir de nouveau droit à ce geste-là, de retrouver son goût, la sensation de sa queue qui emplit ma bouche. Mes doigts se crispent plus fort sur ses hanches, et j’accompagne les mouvements de son bassin, sans chercher à les amplifier ou à les ralentir. Mon regard ne l’a pas quitté, je suis la progression du plaisir sur ses traits, les crispations de son corps qui se tend vers moi. Je l’encourage en soupirs et gémissements que j’étouffe contre sa chair, succion plus marquée de mes lèvres quand son sexe tressaille contre ma langue, juste avant que l’orgasme ne le fauche.

Je ne vais pas trop fort, j’aurais trop la sensation d’autres mains forçant mon corps dans la brutalité et dans la honte alors que mes propres réactions m’échappent, mon corps se soumettant sans mon consentement. (ce qui est assez ironique quand on me connait, moi et ma notion très floue de consentement, depuis peu, j’ai été confronté directement avec mes torts passés) Mais ce soir, ne suis-je pas amplement consentant ?! Je m’accroche à son regard comme à sa peau, et je lâche prise en lisant l’amour dans ses yeux, l’envie, le désir, la confiance, les encouragements. Je me voûte vers elle, expirant de plaisir dans des sons intelligibles qui meurent dans ma gorge. C’est un rush de plaisir indicible qui explose dans une boule incandescente quand je jouis dans sa bouche de velours. Je me crispe tout entier avant d’accepter ce cadeau, le plaisir retrouvé, sans trop savoir si j’y ai droit, si je le mérite. J’ai tellement le sentiment de l’avoir trahie vous voyez ? En ne pouvant pas me défendre, en jouissant physiquement même si sans plaisir d’autres qui m’ont touché, le dégoût me colle à la peau en permanence et je ne comprends pas qu’elle me veuille. Mais là bien sur, c'est trop bon, trop doux, trop fort pour que je résiste. Ca n’a rien à voir puisque c’est bon.

Déboussolé, je ne bouge pas, ma poitrine se soulevant et s’abaissant au rythme de ma respiration. mes mains sont perdues dans ses cheveux, quasiment inertes, et j’ai du mal à endiguer le flot d’émotions contradictoires qui m’agitent. Heureusement les endorphines engluent ma conscience et je ne pense pas clairement. Je me recroqueville vers elle, sans avoir la force de l’attirer vers moi quand je voudrais l’embrasser. Je souffle son prénom d’une voix très basse mais vibrante d’une gratitude sans nom, et de quelque chose...une demande de pardon sans doute, une demande de réconfort, d’amour. —Nina

Je ferme les yeux, retiens mon souffle quand il se répand sur ma langue, et j’attends qu’il ait fini de trembler pour me retirer, libérant doucement sa queue avant de venir embrasser son ventre. Je prends mon prénom murmuré comme un appel à le rejoindre et je remonte en serpentant le long de son corps pour venir me nicher tout contre lui. Je l’enlace, éperdue de gratitude moi aussi parce qu’il m’a laissée lui offrir ce plaisir jusque là interdit. Je n’imagine que trop bien à quel point il a dû être difficile pour lui de se laisser aller et je ne lui en suis que plus reconnaissante. Je glisse mes mains dans son dos, caresse la peau brûlante tandis qu’on roule tous les deux sur le flanc pour se blottir l’un contre l’autre, s’enlacer. Moja duša… Je souffle d’une voix contrainte en venant chercher sur sa bouche un baiser-récompense, sans trop savoir lequel de nous deux est récompensé.

Les rôles sont inversés aujourd’hui. C’est moi qui le réclame, moi qui murmure des mots doux après l’amour, moi qui m’inquiète pour lui et qui me plains sans cesse de ne pas le voir assez. Quand nous nous sommes rencontrés, c’était tout l’inverse et je me demande aujourd’hui si c’est ma punition pour avoir trop lutté. Est-ce qu’il a ressenti la même chose ? Est-ce que moi j’étais comme ça après mon kidnapping ? J’oublie ces questionnements en plongeant mon regard dans le sien, en trouvant refuge entre ses bras. Tu veux rentrer maintenant…?

N’est-ce pas un peu bizarre de se dire que c’était moi le cadeau d’anniversaire ? Que me faire une pipe c’était son cadeau ? Un drôle de rire m’échappe alors qu’elle caresse mes cheveux trempés de sueur. Je ne sais pas lui dire ce que je ressens vis à vis de notre capture, les mots sont bloqués, mais je peux lui dire ce que je ressens pour elle. —Non...encore un peu ici, ja volim te moj andjeo. Je me blottis contre elle, l’enlaçant un peu plus fort, nos jambes enroulés et mon corps haï devient une extension du sien et tout de suite, ça va beaucoup mieux. Je soupire de bien-être à présent, oubliant où nous sommes, pourquoi nous y sommes pour ne plus profiter que de sa douce présence.

Je promène le bout de mes doigts sur sa peau, en pressions, en caresses, avec un air de ravissement extrême. Son corps je l’aime, il est beau, il est merveilleux, il est à moi. Je veux qu’il soit à moi. —Nina ? Je cherche son regard, je pose mon nez sur son nez, voûté, doux comme un agneau —Nina, je t’aime et...et j’aime faire l’amour avec toi. Il y a des choses qu’on peut dire, qui doivent être dites, avec sérieux et gravité, parce que je vous jure que ça n’a rien de drôle, ma vie en dépend. —J’aime ta peau toute douce, et … et ta bouche sur moi et… Tvoj sam, tu le sais pas vrai ? Est-ce qu’elle le sait ? Est-ce qu’elle le veut encore ? Que je sois à elle, que je lui appartienne, parce que je me suis offert ce soir.

J’acquiesce, finalement soulagée malgré ma proposition parce que je n’ai pas très envie de bouger pour le moment, seulement je sais qu’il se sent toujours mieux à l’intérieur et je ne tiens pas à ce qu’il se sente mal. Avant mes anniversaires me rendaient capricieuse mais ce n’étaient que de gentils jeux amoureux, aujourd’hui je ne peux pas me permettre de l’être parce que j’ai trop peur qu’il ne soit pas bien avec moi. Je mélange moi aussi mes jambes aux siennes, avec cette sensation étrange de retrouver l’un de nos gestes d’avant, quand on formait cette espèce de boule de câlins, à n’en plus savoir quelle jambe était à qui, où commençait mon corps et où finissait le sien. C’est ça que je recherche dans le sexe avec lui, cette union totale de nos corps, cette fusion de nos êtres, bien plus que le plaisir en lui-même et pourtant Dieu sait que je suis accro aux sensations délicieuses qu’il sait provoquer chez moi !

Mh ? Je relève le nez vers lui quand il m’appelle, mon regard doux croisant le sien. Et pourtant mon air se fait plus grave à ses paroles, sa déclaration qui est si importante pour moi que je sens mon ventre se nouer douloureusement à ses mots. Je serre les dents pour ne pas me mettre à pleurer, mon hyper-émotivité ne s’est pas envolée, cramée par le soleil de plomb de Slab City, loin de là. Vraiment…? Je demande, naïve sans doute, quand il me dit qu’il aime faire l’amour avec moi. Parce que très honnêtement je n’en suis plus si sûre. Bien-sûr son corps ne me ment pas, mais ce n’est plus comme avant et j’ai parfois peur qu’il se force seulement parce qu’il craint de me perdre s’il ne le fait pas. J’ai peur aussi que ce ne soit plus jamais comme avant, de ne pas réussir à le guérir, à lui faire oublier ces autres qui l’ont blessé. Je lève la main pour la poser sur son visage, contre l’angle de sa mâchoire. Je sais, ti si moja duša… J’hésite un instant avant d’ajouter, bien que je ne sois pas sûre d’en avoir le droit : Tu n’as jamais cessé d’être à moi, Slavenko… Je t’aime… Tu le sais pas vrai ? Je reprends ses mots, parce que moi c’est ça que j’ai besoin de savoir, je ne supporterais pas qu’il doute à ce sujet.

J’esquisse un hochement de tête volontaire quand elle demande vraiment ? Oui vraiment. J’ai juste besoin de ne pas penser. Mes envies se cachent sous une couche de honte tenace, mais elles sont réelles. Et très franchement quand elle se met à m’embrasser très voluptueusement, je déconnecte, alors ça va. J’oublie alors la crainte de ne pas être digne, assez bien pour elle, j’oublie la peur et la douleur, ces souvenirs cauchemardesques et je me réfugie contre sa douceur et l’amour qui vibre entre nous, fil conducteur pour me ramener à la lumière. Ce qu’il y a d’étrange c’est que lorsque nous nous sommes séparés juste avant, j’ai essayé de l’oublier dans d’autres bras, aujourd’hui c’est le mal qu’on m’a fait que je veux oublier dans les siens. J’ai bien plus peur aujourd’hui qu’elle ne veuille pas de moi que lors de notre séjour à Savannah !

Mon visage s’illumine quand elle me déclare sien. Je sais qu’elle m’aime, elle ne serait pas ici sinon, mais c’est différent que de savoir que je suis à elle. Je ne veux pas être un jouet cassé par d’autres qu’on garde dans un coin par nostalgie. —C’est vrai ? C’est ce que je veux. Je le dis d’un air buté de slave. Je suis particulièrement entêté sur la question, et c’est sans aucun doute pour ça que je me suis un peu forcé pour m’offrir totalement ce soir. J’ai d’ailleurs très vite dépassé ce sentiment de sauter sans filet dans l’inconnu, étonné de retrouver des sensations familières ! Je connais ces chemins de plaisir et le désir de volupté me tenaille à nouveau à présent. C’est comme une révolte grondante contre ce qu’on m’a fait, et cette révolte chasse la peur et me jette à nouveau dans les bras de Nina, mon seul secours au monde. —et tu es à moi.

Voilà, on est l’un à l’autre, sinon ça ne peut pas du tout aller ! C’est un baiser propriétaire que je viens chercher sur sa bouche, encore, moi je dis que la nuit ne fait que commencer. Je gronde entre sérieux et plaisanterie (en fait c’est beaucoup plus sérieux que je ne plaisante) —je suis à toi toute la journée de ton anniversaire srce moje !

Je fronce les sourcils. Mais bien-sûr que c’est vrai ! Je ne peux même pas lui en vouloir, je ne comprends que trop bien ce qu’il ressent, j’ai ressenti exactement la même chose plusieurs fois par le passé, cette crainte qu’il ne veuille plus que je sois à lui. Et je la ressens encore aujourd’hui, moins forte que lorsque nous sommes arrivés ici mais bien présente tout de même. Après tout moi aussi, j’ai été entre les mains d’un autre… D’ailleurs il ne me répond pas lorsque je lui demande s’il sait que je l’aime, et mon regard s’assombrit légèrement, de crainte je crois parce que s’il doute de ça alors je suis foutue… Et de culpabilité, aussi, parce que ça signifie que je ne m’y prends pas assez bien pour le lui prouver.

Seulement le jour de mon anniversaire…? Je frotte mon nez au sien, secoue doucement la tête. Non… Je te veux à moi tout le temps… Et là je ne parle pas du tout de sexe, il n’y a pas de sous-entendus ou d'ambiguïté dans ma phrase, contrairement à la sienne je crois bien ! D’ailleurs je demande en basculant sur le dos pour m’étirer : Tu as prévu quelque chose pour la journée ? Je pense bien que non, c’est déjà incroyable qu’il m’ait organisé cette soirée romantique, même si on n’a finalement mangé que deux sucreries et à peine touché à notre thé glacé ! Sinon on pourrait peut-être aller se balader… Je sais pas où mais on a une voiture après tout. Pas très loin bien-sûr, je sais qu’il veut éviter la ville et qu’on doit se faire discrets pour ne pas se faire remarquer, mais je crois que ça me ferait du bien (et à lui aussi) de sortir un peu le nez du campement.

Je flotte béatement parce qu’elle veut de moi. Je suis tellement émerveillé que je ne remarque pas trop la contrariété de son regard. Un sourire d’enfant illumine une nouvelle fois mon visage et mon coeur s’est emballé d’amour et de gratitude pour elle. Comment est-ce que je pourrais douter quand nous sommes nus enroulés l’un avec l’autre, si proches, peau contre peau ? Je sens sa chaleur, les battements de son coeur et notre odeur, la notre sur nous, mélangée qui me donne encore envie de jouir sur elle, de me fondre en elle à en perdre ma propre identité, pour ne faire qu’un seul être.

—Tous les jours ! Je le dis avec ferveur —Tout le temps ! Je le répète pour la rassurer, lui plaire aussi, minaudant comme un ado amoureux. Je suis vaguement shooté aux endorphines, et à la joie. Elle roule sur le dos et je me redresse sur un coude pour l’admirer. Mon Dieu mais qu’elle est belle ! J’en ai le souffle coupé à la fois ainsi alanguie comme une jolie panthère. Je la mange du regard, sa poitrine redevenue plus menue, son ventre plat, ses jambes qui gardent leur finesse et la musculature d’une jolie cambrioleuse. Mais ce qui me plait le mieux, c’est son visage tout en ombres et en lumières avec le feu qui dansent sur sa peau et ses cheveux qui cascadent en nappe sombre. J’ai la gorge noué en la dévorant des yeux.

Je secoue la tête —non rien d’autre… Je sais que la surprise n’était sans doute pas à la hauteur de celles que j’ai pu lui faire autrefois. J’acquiesce à sa proposition, il y a encore du carburant dans la voiture, et il me reste quelques dollars, pas grand chose, pas de quoi faire le plein mais assez pour ajouter des kilomètres au compteur. —Oui, c’est une bon idée. Tu veux qu’on aille à Salton Sea ? Ou à Salvation ? Salvation est assez prêt mais y aller à pied par une chaleur pareille, c’est une expédition. Je m’assieds pour tendre la main vers mon verre encore à moitié plein de thé réchauffé que j’avale goulument. —Dis-moi chérie, c’est ton anniversaire, on fait ce que tu as envie.

J’ai un rire bas, gêné parce que je ne suis plus habituée à m’entendre rire figurez-vous, quand il me répond avec cet empressement enfantin qui me fait fondre. Oui, tout le temps. Et moi aussi je suis à toi, tout le temps. J’ai encore besoin que ce soit réciproque, je n’ai jamais voulu de quelque chose qui soit à sens unique entre nous. Il m’a fallu une éternité pour oser dire qu’il était à moi, en revanche mon comportement, mes choix ont toujours montré que je ne voulais pas qu’il en soit autrement. C’est moi la première qui ait demandé à ce que notre relation soit exclusive. Dès le moment où j’ai cédé, où j’ai accepté de le laisser entrer pour de bon dans ma vie, je n’ai plus voulu qu’il aille dans d’autres bras, l’idée même m’était insupportable. Avec moi, de toute façon, c’est très souvent tout ou rien, tout noir ou tout blanc, je suis bien trop entière pour que ce ne soit pas le cas.

Je ne suis pas déçue qu’il n’ait rien prévu d’autre, ma question était sincèrement innocente, je cherchais juste à savoir si on pouvait prévoir quelque chose et je suis ravie que ce soit le cas. Je suis trop heureuse pour être déçue de toute façon, je prends tout ce qu’il me donne. Déjà, je vibre à chaque fois qu’il a un mot tendre pour moi, ne serait-ce que parce qu’il m’appelle chérie, ça me donne envie de me jeter à son cou pour l’embrasser encore. Je hausse les épaules. J’ai jamais été voir ni l’un ni l’autre, même pas Salvation Mountain… Je fronce le nez, roule sur le ventre parce que je ne tiens pas en place, je ne suis pas vraiment fatiguée. Je pose mes coudes sur un coussin, mon menton dans ma main et je plie les jambes, battant l’air de mes pieds en réfléchissant. Si on veut être tranquilles plutôt Salton Sea mais est-ce qu’il y a vraiment quelque chose à faire là-bas…? J’sais même pas si on peut se baigner… Sinon Salvation, j’ai envie aussi de voir à quoi ça ressemble depuis le temps que tu m’en parles !

Son rire, même bas, me ravit et je souris en retour, émerveillé de l’entendre à nouveau. Je remplis à nouveau mon verre, avant de lui donner le sien. Je ramène le sac isotherme, fouine dedans pour constater que le pain de glace a sacrément fondu, il reste à peine un glaçon de la taille d’un poing, je me retrouve les doigts barbotant dans l’eau gelée. Par jeu, j’en balance quelques gouttes à Nina dans le creux de ses reins, merveilleuse chute en cascade. Je secoue la tête d’un air peu convaincu. —de ce que j’sais, on peut se baigner mais ça donne pas envie en fait. Ca pue et c’est hyper salé ! Si tu veux pas finir comme une morue salée… Ah la comparaison ! J’ai une mimique d’excuse, ça n’est pas très vendeur comme destination. —Mais y a quand même des gens qui habitent à … machin Beach, j’ai oublié le nom. Ou, on peut aller à Salvation et après, je ne sais pas, pousser ailleurs si on a fait le tour. Ca dépend de ce que tu as envie de faire. La clim de la bagnole est un peu poussive, mais ce sera pas pire que dehors !

Du bout des doigts, je dépose à nouveau des gouttes d’eau gelée entre ses omoplates, pour le plaisir de voir sa peau frissonner. Je souris très légèrement en plissant le regard —ou on peut aller ailleurs. Mexicali ou je ne sais pas trop, je connais pas vraiment les environs. On t’a pas parlé de quelque chose de sympa à faire au Queenie ? Je croyais que tu faisais un peu office de guide touristique. C’est pas le rôle des serveuses ? Du café et un bon conseil de visite ?

Je récupère le verre tendu avec un sourire de remerciement, et j’ai à peine le temps d’en avaler une gorgée que je me retrouve aspergée d’eau froide. Je couine dans un nouveau rire, plus spontané cette fois, et je me cambre instinctivement pour échapper aux gouttelettes glacées. Pourtant c’est agréable par cette chaleur mais il m’a prise par surprise ! Pourquoi tu me proposes d’aller dans un endroit qui… qui pue et où l’eau est hyper salée ?! Je demande dans un sourire amusé. T’as vraiment rien compris aux rendez-vous romantiques, mon amour ! Je secoue la tête, faussement dépitée. Oui enfin machin Beach, si y a des gens qui y vivent mais rien à y faire, ça sert à rien d’y aller… Non, Salvation Mountain c’est bien, j’ai envie de voir à quoi ça ressemble, et on verra ensuite si on va ailleurs. Moi non plus je ne suis pas dupe du fait qu’on n’a pas assez d’essence, ni assez de fric, pour aller où on veut. Haha, comme si c’était le seul problème hein !

J’ai un frisson plus marqué au contact, une nouvelle fois, de l’eau gelée, mais c’est différent parce qu’il ne m’éclabousse pas cette fois, non, il la dépose tout doucement, du bout des doigts, et ça a le don d’éveiller de drôles d’envies dans le creux de mes reins. Je les étouffe du mieux que je peux, mais ma peau frémissante me trahit je crois… Mexicali ? Si je vais à Mexicali c’est pour voler des trucs, j’pourrais pas m’en empêcher. Je papillonne des cils. T’as tendance à l’oublier mais t’as épousé une voleuse, moja duša. Je secoue la tête. Tu sais je cause pas beaucoup au dinner… Et je crois pas qu’il y ait tant de choses que ça à faire dans le coin… Non, moi je me fais discrète, je parle aussi peu que possible et surtout je ne pose pas de questions ! Je tourne la tête, lève le nez vers lui. Toi, tu préfères quoi ? Mexicali ou Salvation dis-moi ?

J’ai un fou rire bref et contenu, mais fou rire quand même quand elle me tarabuste sur mes choix de visite désastreux. — —J’sais pas, il parait que c’est à voir ! Les charmes de la nature locale sans doute, qu’est-ce que j’en sais ? C’est romantique les natures mortes ! P’tre bien que c’est parce qu’il y a autant d’eau en un seul endroit, ça plait aux locaux, vu la sécheresse ambiante Et puis soyons sérieux, il n’y a que peu d’endroits à voir dans le coin, peu d’endroits qui soient autre chose que du sable, des cailloux, aride, avec un ou deux cactus perdus dedans. —Ok, ok, Salvation mountain, tu pourras acheter des babioles religieuses pour décorer le van, ça fera bien à côté du piège à rêves. C’est tendance dans le coin, t’as pas vu, ils ont tous une croix ou un chapelet suspendu au rétro de leur bagnole..

Très concentré, mais capable quand même de suivre une conversation, je trace lentement un chemin de gouttes froides le long de la colonne vertébrale de Nina, des épaules à la chute de reins. plic . —Tu peux voler si tu veux mais c’est peut-être pas une très bonne idée de repasser la frontière avec cette caisse et le bus...j’avoue j’en ai soupé d’hier soir. ploc — je préfère Salvation, on dépensera moins d’essence, et on ira boire un verre si tu veux, un truc froid. plic — très froid ploc Je me penche pour poser un baiser sur sa nuque, et de l’index, je suis le chemin des gouttes en les étalant sur la peau de Nina. Après un instant de réflexion, je ramène le sac entre mes jambes et patiemment, avec le couteau, je détache un glaçon pas trop gros sur le reste de glace.

J'écarquille les yeux, tellement surprise de l'entendre rire que j'en reste un instant muette, avant de sourire béatement, le cœur battant sensiblement plus vite. Dieu que je peux aimer son rire, comme c'est bon de l'entendre à nouveau. Je secoue doucement la tête, une lueur nouvelle dans le regard. Ca plaît p't'être aux locaux mais tu sais bien qu'ta femme aime pas faire comme tout l'monde, mh ? Et puis bon, je pense que c'est de la torture inutile que d'aller dans un endroit où il y aurait plein d'eau, mais dans laquelle on ne pourrait pas se baigner. Parce que personnellement, si ça sent le poisson mort et que le sel brûle la peau, je crois que je vais m'abstenir. Déjà que l'hygiène ici c'est pas trop ça... Moui, là non plus j'ai pas très envie d'faire comme tout le monde... Un chapelet dans le van je crois pas que ça me plairait beaucoup... Mais je trouverais peut-être d'autres babioles, on verra. Ou des inspirations !

Je suis distraite de mes élucubrations par les gouttes qu'il sème sur ma peau, le contact de chacune d'entre elles me fait frémir et j'ai chaque fois besoin de quelques secondes pour retrouver le fil de la conversation. Ouais, t'as raison... La prochaine fois qu'on ira voler à Mexicali, on chopera la caisse ici. Histoire de ne pas attirer l'attention. Boire un verre ? Ils servent à boire à Salvation Mountain ? Je n'ai pas entendu parler d'autre chose que d'habitations étranges là-bas mais il s'y connaît mieux que moi sur le sujet. Je fronce les sourcils, plisse le nez en levant la tête, me démanchant le cou pour tenter de voir ce qu'il fabrique... Et une brusque bouffée de chaleur me prend quand je le vois avec un glaçon entre les doigts. Des souvenirs terriblement précis me reviennent en mémoire et je sens déjà une chaleur nouvelle se déployer au creux de mon ventre.